Si on ne compte plus les ouvrages sur les porte-avions français et sur l’aviation embarquée, bien plus rares sont en revanche les essais tentant de remettre en perspective historique une structure aussi singulière que le groupe aéronaval (GAN) français. Et c’est précisément ce manque que vient combler cet ouvrage, fruit d’un travail de mémoire réalisé à l’École de guerre en 2016-2017.
En étudiant les mutations du GAN de la sortie de la guerre froide jusqu’en 2016, l’auteur met en lumière la formidable bascule qui s’opère en quelques années dans le format et les conditions d’emploi de cette structure que la Marine nationale met en œuvre depuis les opérations d’Indochine. En 1990, le GAN est une « arme de statut » disponible en permanence mais vieillissante, employée en soutien d’une politique d’indépendance nationale, et encore peu familière des opérations en coalition. Un peu plus de deux décennies plus tard, le GAN est devenu force de frappe dans la profondeur, moderne et homogène, mais intermittente, employée principalement en coalition dans des campagnes à dominante aéroterrestre.
Quels sont les ressorts de cette profonde évolution ? En se basant sur un large corpus documentaire historique et sur un travail d’entretiens avec de nombreux témoins de cette période, l’auteur propose une analyse des dynamiques capacitaires, opérationnelles, conceptuelles et par moments politiques qui sous-tendent les ruptures et les continuités de cette période. La principale rupture est la fin de la permanence du GAN au crépuscule de la décennie 1990, qui s’accompagne d’une compression sans précédent du format du groupe aérien embarqué, alors même que les performances de ce dernier sont démultipliées sous l’effet du renouvellement de ses moyens. La principale continuité est l’adaptabilité sans faille dont fait preuve le GAN pour épouser les évolutions de son environnement opérationnel et y faire valoir ses avantages comparatifs. Paradoxe ? Comment souvent en matière historique, paradoxe en apparence uniquement…